Les travaux dans le monastère.
Deux frères se succédèrent comme Abbé dans la première partie de ce siècle et entreprirent de gros travaux dans le monastère.
Tout d’abord Jacques de Mauny, qui fut abbé de 1505 à 1542. Il fit refaire les voûtes du chœur et le petit clocher abattus par la foudre en 1513. Il fit aussi construire en 1515 la grande tour devant l’atrium de l’abbatiale et fabriquer les stalles en bois du chœur.
Selon Dom Germain, c’est Jacques de Mauny qui fit aussi reconstruire le palais abbatial, mais l’abbé Chevalier attribue cette construction à son frère François de Mauny qui fut abbé de 1542 à 1554.
Ce dernier, premier abbé commendataire par nomination du Roi et bulle pontificale, fit construire le jubé de l’abbatiale et y mit la peinture des quatre évangélistes et ses armoiries.
On voit encore aujourd’hui la trace de la reconstruction de la maison abbatiale par les de Mauny. Il reste leurs armoiries sur deux linteaux de porte dans la grange de la maison de l’Abbé. Elles se blasonnent « d’argent au croissant de gueules » mais bien sur, après six siècles, il n’y a plus de couleur.
Eustache du Bellay, cousin germain du poète Joachim du Bellay, qui était en même temps évêque de Paris, fut Abbé de Noyers de 1560 à 1565. Il assista au concile de Trente en 1563.
Il fit réparer la partie orientale du cloître et y mis ses armoiries.
Noyers et les guerres de religions.
Ce 16e siècle fut celui des guerres de religion et l’abbaye n’échappa pas à ses conséquences.
Dès le début des troubles qui opposèrent protestants et catholiques de 1562 à 1598, les abbayes de la région furent ravagées par les protestants.
Noyers subit leurs assauts en 1580. Pour éviter la fureur des calvinistes, les religieux prirent la fuite abandonnant le monastère. Les protestants provoquèrent de grands dommages, rasant des bâtiments, pillant et emportant trésors sacrés, vases et reliques. Les chartes furent déchirées.
En novembre 1589, on ne sait pourquoi disent les textes, des catholiques des troupes du Duc de Mayenne qui dirigeait la Sainte Ligue après l’assassinat du Duc de Guise, profanent l’église, brûlent des titres, volent le trésor et tuent un moine.
Noyers et le futur Henri IV.
En 1587, Henri de Navarre, qui ne sera Henri IV que deux ans plus tard, remontait vers le Poitou, parti de la Rochelle le 24 août. Les troupes catholiques chargées de lui barrer la route s’étaient enfermées à La Haye en Touraine (Descartes). Henri de Navarre allait de château en château. Il couchait à Sammarçolles le 30 août, à Monts-sur-Guesnes le 1er septembre, s’arrêtait à Marmande le 2 où il reste quelques jours. Le 5 septembre il quitte Marmande et va à l’abbaye de Noyers où il prend logis jusqu’au 8.
Voilà qui est surprenant. Pourquoi ce chef protestant logea-t-il dans cette abbaye catholique ? S’est-il imposé par la force ? Les moines avaient-ils désertés le monastère comme en 1580 ?
Aucun document n’apporte d’explications.
La peste et Saint Gratien.
Malmené par les guerres de religions, Noyers n’échappe pas non plus en 1586 à la peste, 60 à 80 personnes du bourg décédent. Ce sera l’occasion d’implorer Saint Gratien, regardé après Notre Dame, comme le principal patron de l’abbaye. Elle conservait une partie de son corps et c’était le but d’un pèlerinage actif.
Dom Oury a publié un long article sur Saint Gratien que l’on retrouvera plus loin dans un chapitre qui lui est consacré.
Fait divers du 16e.
Malgré la protection divine, l’abbaye n’était pas à l’écart de grands malheurs comme ce fut le cas en 1590. La fatalité vint frapper les habitants des villages environnants.
Lors des fêtes de rogations, qui avaient lieu le 29 mai, les religieux et la population étaient allés en procession à Marcilly.
Après celle-ci, un bateau fit un premier voyage pour ramener les moines et repartit chercher les fidèles. Mais lors du second voyage, le bateau coula brutalement et il y eut plus de cinquante noyés.
Depuis cet événement, les religieux allaient à Marcilly le mardi des rogations chanter le répons « Libera me Domine de morte eterna » qui est l’absoute du Requiem.